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L’ABM de fidélisation (ou défensif) : une approche proactive pour préserver les clients en désengagement

Dans 90 % des cas, quand on parle d’ABM, on parle de cibler des comptes froids ou tièdes pour les convertir en clients. L’ABM est perçu comme une arme de chasse un peu plus noble que la prospection classique, pilotée par le marketing, au service du new business.

Résultat : les comptes déjà clients, même critiques, sortent du radar de l’ABM et, plus largement, des efforts vente et marketing un peu poussés. On considère qu’ils sont « acquis », qu’ils sont « dans le pipe Customer Success », qu’ils ont déjà été convaincus. On passe à autre chose.

Mais sur des deals B2B complexes, longs, à fort enjeu et à fort panier moyen, la perte d’un client est mille fois plus douloureuse que la non-conversion d’un prospect, aussi gros soit-il. La logique qui sous-tend l’allocation des ressources entre le new biz et la préservation des clients fragiles mérite d’être posée. Dans le B2B, le churn est rarement soudain. Il est généralement précédé de signaux faibles à modérés de désengagement, des frictions, des doutes, un changement de ton, une fin de non-recevoir quand on essaie de se projeter avec le client.

C’est ici que l’ABM de fidélisation (ou l’ABM défensif) prend tout son sens. Objectif : remettre notre vraie valeur ajoutée sur la table et prouver que l’on a beaucoup à apporter à son business.

Timing : quand activer une campagne d’ABM défensif ?

L’ABM défensif ne s’active ni quand le contrat est sur le point d’être rompu, ni quand tout va bien, car vous risquez d’éroder le ROI de votre marketing (sauf si vous voulez vraiment sécuriser un compte ultra-stratégique).

Dans l’idéal, l’ABM défensif s’active quand le compte est encore stable sur le papier, mais que la dynamique relationnelle commence à donner des signes de dégradation. Ce n’est pas un « moment clé » officiel. C’est un changement de régime qui passe souvent inaperçu… sauf si on sait quoi regarder :

  1. Nos interlocuteurs chez le compte en question se déconnectent progressivement du sujet. Ils ne répondent plus aux relances, déclinent les réunions ou délèguent à des profils plus juniors ou plus opérationnels. Le lien relationnel se distend ;
  2. Les discussions deviennent strictement contractuelles. On ne parle plus d’enjeux, plus de vision, plus de projet commun. On parle SLA, incidents, facturation. Le client vous voit comme un fournisseur, plus comme un partenaire ;
  3. Le client refuse de se projeter. Dès qu’il s’agit de planifier un élargissement du périmètre ou un nouveau chantier, ça bloque. Il botte en touche, change de sujet ou dit « on verra plus tard » ;
  4. Les feedbacks deviennent plus flous, moins enthousiastes, voire réprobateurs. On vous dit que « ça va » mais sans enthousiasme. On ne vous fait plus remonter les vraies tensions. Vous n’êtes plus dans la boucle stratégique ;
  5. Un concurrent (ou un consultant/freelance/salarié) est invité sur une brique marginale du périmètre. Pas sur le cœur du contrat, mais sur un morceau adjacent. Officiellement, « pour benchmarker » et « créer des synergies ». En réalité, pour commencer à créer une alternative.

À lire également : [Les cas BtoB Leaders] Comment piloter une campagne ABM sur un grand compte à plusieurs BU ?

C’est à ce moment-là qu’il faut lancer une campagne d’ABM défensif. Pas pour faire une relance commerciale maquillée. Mais pour remettre de la valeur business dans la discussion. Montrer que vous êtes toujours capable d’accompagner leurs enjeux, pas juste d’exécuter ce qui est prévu au contrat.

Si vous attendez le mail de résiliation ou la baisse du volume, il sera trop tard. L’ABM défensif doit précéder la crise, pas tenter de l’éteindre.

Composition de l’équipe : qui doit piloter une campagne d’ABM défensif ?

Dans une logique d’ABM traditionnel, l’équipe projet est souvent marketing-first. On construit des assets, on segmente, on scénarise des messages, puis on implique les sales au moment de l’activation.

Mais dans une campagne d’ABM défensif, la mécanique est inversée : c’est le terrain qui donne le signal, et c’est le terrain qui doit rester aux commandes. L’équipe idéale repose sur trois piliers : un Sales Owner, le référent marketing et un top manager sponsor pour réactiver le lien au bon niveau.

#1 Le Sales Owner : celui qui connaît le compte de l’intérieur

C’est souvent le KAM, le Directeur de compte ou le commercial en charge du client depuis (au moins) plusieurs mois. Il a l’historique de la relation, connaît la structure du compte, les interlocuteurs clés, les enjeux business évoqués en réunion, et surtout : il sent quand quelque chose déraille.

C’est lui qui donne le GO. C’est aussi lui qui porte l’objectif de réengagement. Il doit identifier la ligne de fracture, clarifier où le deal se grippe : manque de projection ? désalignement politique ? sujet de fond mal couvert ?

Concrètement, c’est lui qui :

  • sélectionne les interlocuteurs à cibler en priorité dans le compte (pas forcément les mêmes qu’à la signature) ;
  • remonte les objections sous-jacentes à traiter dans les contenus ou dans les échanges ;
  • propose le fil narratif de la campagne (enjeu métier + valeur potentielle) ;
  • coordonne l’orchestration entre les temps forts relationnels, les contenus sur-mesure et les actions de lobbying en interne.

S’il est bon, il ne fait pas « remonter » le problème. Il contribue à l’élaboration d’une stratégie de reconquête, avec un vrai angle métier, pas (juste) un geste commercial ou un mail de check-in.

#2 Le référent marketing : celui qui transforme l’alerte en plan d’action

C’est lui qui transforme le signal de désengagement remonté par le Sales Owner en plan d’action. Il ne gère pas la relation commerciale, mais il pilote la mécanique de visibilité, de preuve et d’influence autour du compte. Concrètement, il :

  • formalise un narratif clair avec le Sales Owner : enjeu identifié, bénéfice métier, proposition de valeur spécifique ;
  • construit une séquence d’activation multi-supports : par exemple une série d’emails personnalisés, un document de haut niveau sur les leviers d’optimisation métier, l’organisation d’un mini-événement pour le client, un contenu co-brandé s’il y a un partenaire, etc. ;
  • mobilise les bons profils internes (les créa) pour produire : le marketing produit (pour la partie argumentaire), le contenu (pour écrire les supports ciblés), un designer (si un livrable doit circuler en interne chez le client), un expert technique ou un consultant (pour créer une ressource crédible côté usage) ;
  • vérifie que chaque contenu est adapté à son destinataire dans le compte : langage, angle, niveau de technicité, et timing.

Son objectif : réinstaller la valeur au bon endroit en créant des micro-assets pour adresser les signaux faibles observés.

Le top manager sponsor : celui qui rouvre le jeu au bon niveau

C’est un membre du comité de direction ou un responsable d’unité avec un vrai poids politique dans l’entreprise. Il n’est pas là pour exécuter la campagne, mais pour rouvrir un dialogue au plus haut niveau quand le lien avec le client s’est distendu. Son intervention permet de désamorcer un malaise latent et de repositionner la relation à un niveau décisionnaire.

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Pourquoi lui ? Parce que le désengagement d’un client est souvent lié à un désalignement perçu sur les enjeux, les ambitions ou le niveau de service. Si un projet patine ou que la relation se crispe, un manager de haut niveau peut repositionner la promesse. Et surtout, il parle à égalité avec les décideurs côté client.

Ce qu’il fait, concrètement :

  • il prend contact avec son homologue (DG, DAF, CTO…) dans un cadre non commercial, voire informel, pour rouvrir la discussion sur de meilleures bases ;
  • il recadre la relation autour d’une ambition partagée en sortant du terrain contractuel ou des incidents opérationnels ;
  • il transmet ensuite au duo Sales + Marketing les signaux faibles, les attentes implicites et les nouvelles marges de manœuvre perçues côté client ;
  • il reste en soutien actif, notamment pour valider les choix forts (investissements, gestes contractuels, priorisation des cibles internes, etc.).

Sans cette intervention, la campagne risque de rester bloquée à un étage qui n’a ni le pouvoir, ni l’envie de s’engager.

L’ABM défensif, un levier de rétention pour les clients VIP

L’ABM défensif est un levier d’optimisation du RevOps encore sous-exploité par la plupart des entreprises.

Sa mise en œuvre repose sur l’intégration systémique de trois composantes, à commencer par un framework de détection multi-signal qui associe des métriques d’engagement quantifiables (fréquence et durée des interactions, délais de réponse) à des marqueurs qualitatifs (ton des échanges, niveau hiérarchique impliqué). Ce dispositif de surveillance doit idéalement s’intégrer à votre stack technologique existant via des connecteurs API entre votre CRM et vos plateformes d’analytics.

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Il faut ensuite une architecture de contenus suffisamment modulaires pour pouvoir déployer rapidement des assets personnalisés sans repartir de zéro à chaque campagne. L’approche optimale consiste à développer des templates d’intervention par persona et par point de friction, adaptables à chaque contexte client et assemblables en workflows d’activation selon la gravité du désengagement détecté.

Enfin, il faudra un protocole d’escalade qui définit précisément les seuils de déclenchement, les niveaux d’intervention et la séquence d’implication des différentes parties prenantes. Ce protocole doit être documenté dans un playbook accessible à toutes les équipes concernées, avec des indicateurs de performance associés à chaque phase d’intervention.

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