Certaines entreprises du B2B misent sur la montée en gamme pour échapper à l’érosion de leurs marges. Mais elles oublient parfois que la transition vers le premium ne résume pas à un simple repositionnement tarifaire. Décryptage…
Pourquoi engager une transition vers le premium ?
La montée en gamme répond souvent à l’érosion des marges sur les marchés historiques. Face à la standardisation de leur offre et/ou à une concurrence agressive sur les prix, les entreprises du B2B cherchent à créer une valeur différenciante : expertise sectorielle pointue, accompagnement sur-mesure, garanties étendues, services à forte valeur ajoutée, etc.
Cette transition se matérialise dans un premier temps par l’évolution de l’offre. Par exemple, les entreprises industrielles enrichissent leur offre avec des services connexes : maintenance prédictive, formation des équipes, consulting, etc. Les sociétés de services renforcent leur niveau d’expertise et leur spécialisation sectorielle, les éditeurs développent des modules avancés et un accompagnement personnalisé sur l’utilisation de leur solution, etc.
Cette évolution s’accompagne d’une mise à niveau de l’organisation commerciale. Les équipes adoptent une approche consultative pour diagnostiquer les besoins de manière plus fine et valoriser les bénéfices business. Le marketing construit un positionnement prix-valeur plus cohérent, et les équipes support montent en expertise pour délivrer un service premium.
Cette transformation impacte aussi le profil des clients ciblés. L’entreprise se concentre sur des segments à plus forte valeur ajoutée : grands comptes, secteurs complexes, projets à plus large périmètre, etc. Ce recentrage permet de justifier des prix plus élevés et d’investir dans la qualité de service.
Il faudra toutefois composer avec l’allongement naturel des cycles de vente. La validation d’une offre premium implique davantage de décideurs et un processus d’achat plus rigoureux. L’entreprise doit adapter son mode de génération des revenus : moins de volume mais des tickets plus importants, avec une gestion de trésorerie qui prend en compte cette nouvelle variable.
Attention à ces points de vigilance si vous prévoyez une montée en gamme
La montée en gamme n’est pas un simple repositionnement tarifaire. Elle exige une refonte complète de la chaîne de valeur : enrichissement de l’offre, montée en expertise des équipes, évolution de la qualité de service, montée en compétence du Customer Success, etc. Les transitions vers le premium qui échouent se basent généralement sur des changements cosmétiques dans le marketing sans impact réel sur la proposition de valeur.
La force commerciale doit basculer vers une posture consultative. Exit la vente de solutions, place au conseil business. Il faudra pouvoir compter sur des commerciaux qui maîtrisent les enjeux sectoriels, qui construisent et déroulent des business cases solides et qui challengent les besoins des clients. Et il n’y pas de miracle : il va falloir investir dans des formations poussées, un vrai coaching terrain et, souvent, des recrutements de profils plus seniors.
Mais attention à ne pas adopter une approche brutale. Les prix n’augmentent qu’à partir du moment où l’offre délivre plus de valeur. Ne comptez pas sur le surcoût sur les premiers clients pour financer le développement de produit. Le support doit se structurer en parallèle pour délivrer un service premium. Ce séquençage vous évitera le rejet du marché tout en préservant vos marges.
Dans le même sens, vos clients historiques méritent un plan sur mesure ou, à minima, qui tiennent compte de leur historique et de la Customer Lifetime Value (CLV). Certains ne suivront pas forcément l’évolution tarifaire malgré tous vos efforts : acceptez-le. D’autres adopteront vos nouvelles offres à condition d’un accompagnement renforcé. Cette migration client par client vous permettra de sécuriser au maximum le portefeuille existant sans freiner la transformation.
N’oubliez pas de prendre en compte l’impact sur la trésorerie. Les cycles de vente s’allongent avec l’augmentation des tickets, et les investissements en R&D, en formation et en marketing vont forcément augmenter. Le chiffre d’affaires peut temporairement baisser avec la perte des clients non premium. Cette période exige donc des réserves solides.
Enfin, votre nouveau positionnement doit éviter deux écueils : ne devenez pas élitiste trop vite, au risque de vous déconnecter de votre marché… mais attention à ne pas être suffisamment différenciant, car vous aurez une grosse pression sur vos prix. La crédibilité « premium » se construit sur des preuves tangibles : des références prestigieuses, des indicateurs de performance, des expertises reconnues.