De nombreuses études le montrent : les marketeurs sont sous pression pour justifier leurs dépenses et démontrer leur contribution à la performance commerciale. Et les méthodes traditionnelles de budgétisation, souvent basées sur des ajustements incrémentaux d’une année sur l’autre, ne permettent pas toujours d’optimiser l’allocation des ressources ni de s’adapter rapidement aux changements du marché.
Aussi, avec la multiplication des canaux marketing et l’évolution rapide des technologies, le marketing doit pouvoir réévaluer régulièrement l’efficacité de chacune de ses initiatives. Les entreprises du B2B recherchent donc des approches permettant d’aligner plus étroitement les investissements marketing avec les objectifs stratégiques tout en maximisant le retour sur investissement.
C’est dans ce contexte que le Zero-Based Budgeting (ZBB) s’impose de plus en plus auprès des entreprises pionnières qui souhaitent repenser fondamentalement l’allocation des ressources. On fait le point…
Qu’est-ce que le Zero-Based Budgeting ?
Le Zero-Based Budgeting (ZBB), ou budgétisation base zéro, est une approche financière qui remet à plat l’intégralité du budget marketing chaque année. Contrairement à la méthode traditionnelle qui ajuste le budget précédent, le ZBB part d’une page blanche et exige une justification détaillée pour chaque euro dépensé.
Dans le contexte du marketing B2B, cette méthode implique une analyse approfondie de chaque activité, canal et campagne. Chaque investissement doit prouver sa valeur et son alignement avec les objectifs stratégiques de l’entreprise. Le ZBB ne se contente pas de questionner les nouvelles dépenses : il remet en cause également les dépenses récurrentes considérées comme acquises.
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Cette approche s’articule autour de « paquets de décision ». Chaque initiative marketing est présentée comme un paquet distinct détaillant ses coûts, ses bénéfices attendus et les alternatives envisageables. Ces paquets sont ensuite classés par ordre de priorité en fonction de leur impact potentiel sur les objectifs de l’entreprise.
Le ZBB va bien au-delà d’un simple objectif de réduction des coûts. Il vise à optimiser l’allocation des ressources en privilégiant les activités à forte valeur ajoutée. Concrètement, il implique trois grandes actions :
- Examiner chaque activité marketing individuellement, sans se baser sur les budgets précédents ;
- Analyser en profondeur les données de performance de chaque initiative, y compris celles qui sont habituellement reconduites sans question ;
- Évaluer le retour sur investissement réel de chaque action, en tenant compte de l’ensemble du parcours client (et pas seulement du coût d’acquisition, par exemple).
C’est ce processus d’examen minutieux qui peut mettre en évidence des informations surprenantes sur l’efficacité relative de différentes activités marketing.
Cette méthode exige une collaboration étroite entre les équipes marketing, finance et ventes. Elle nécessite une culture de la donnée robuste, où chaque décision est étayée par des métriques précises. Le ZBB pousse les équipes marketing à adopter une mentalité d’investisseur en évaluant chaque dépense en termes de rendement potentiel plutôt que comme un coût fixe inévitable.
La méthodologie pour implémenter le Zero-Based Budgeting en marketing B2B
La constitution de l’équipe
L’implémentation du Zero-Based Budgeting dans le marketing B2B commence par la constitution d’une équipe pluridisciplinaire qui regroupe des marketeurs, des financiers et des analystes de données.
Dans le cas d’une petite structure, cette équipe peut se résumer à une personne polyvalente, souvent le directeur marketing ou le responsable financier, qui devra endosser ces différents rôles et collaborer étroitement avec la direction générale ou un consultant externe.
Cette équipe doit d’abord établir une taxonomie claire des activités marketing en les catégorisant par fonction (acquisition, rétention, brand awareness) plutôt que par canal.
L’audit des dépenses
Ensuite, l’équipe procède à un audit exhaustif des dépenses actuelles en remontant jusqu’au niveau le plus granulaire.
Cet exercice révèle souvent des dépenses « fantômes » ou des inefficacités cachées. Par exemple, on peut découvrir des abonnements à des outils sous-utilisés ou des campagnes récurrentes jamais remises en question.
La création des paquets de décision du Zero-Based Budgeting
L’étape la plus décisive reste la création des « paquets de décision » évoqués plus haut. Chaque activité marketing est présentée sous forme de projet, avec différents niveaux d’investissement possibles (minimal, optimal, ambitieux).
Ces paquets englobent des prévisions de ROI basées sur des données historiques et des benchmarks sectoriels, dans la mesure du possible.
Un processus de notation est ensuite mis en place. Chaque paquet est évalué selon des critères prédéfinis : alignement stratégique, impact sur le chiffre d’affaires, renforcement de la position concurrentielle, etc. Dans les grandes entreprises, cette notation doit impliquer des représentants de différents services pour éviter les biais.
L’allocation finale du budget et le suivi
L’allocation finale du budget se fait lors d’ateliers collaboratifs où les paquets sont débattus et priorisés. Ces sessions peuvent révéler des synergies insoupçonnées entre différentes initiatives.
La mise en œuvre du ZBB s’accompagne d’un système de suivi rigoureux. Des revues trimestrielles permettent d’ajuster le tir en fonction des performances réelles en réallouant les fonds des initiatives sous-performantes vers celles qui surperforment.
Les pièges à éviter et les facteurs clés de succès du ZBB en marketing B2B
L’adoption du Zero-Based Budgeting peut s’accompagner de quelques écueils. Le premier est évidemment de tomber dans l’excès de prudence en coupant systématiquement les budgets des initiatives à long terme au profit d’actions à retour rapide. Cette orientation peut compromettre la construction de la marque, par exemple, qui est pourtant garante de revenus futurs.
L’autre piège courant est de sous-estimer le temps et les ressources nécessaires pour mener à bien l’exercice ZBB. Cette méthode exige du temps au début, pour réaliser une analyse approfondie de l’existant et tout remettre à plat.
La résistance au changement peut également entraver le succès du ZBB dans les grandes structures. Certains managers peuvent percevoir cette approche comme une remise en question de leurs décisions passées. Une communication claire sur les objectifs du ZBB et une implication large des équipes sont donc essentielles pour surmonter ces réticences.
Globalement, il s’agira de maintenir une vision équilibrée entre efficacité à court terme et investissements stratégiques à long terme. Le ZBB ne doit pas devenir un outil de coupe budgétaire drastique, mais un moyen d’allouer intelligemment et de façon agile les ressources pour soutenir la croissance durable de l’entreprise.