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[Guide pratique] Le SLA : un document qui encadre l’alignement Sales et Marketing

Le désalignement entre les Sales et le Marketing est probablement la friction la plus médiatisée et la plus documentée du B2B. Entre les commerciaux qui épinglent des leads inexploitables et les marketeurs frustrés de voir leurs contacts ignorés, la collaboration tourne souvent au dialogue de sourds.

Le Service Level Agreement (SLA) est une piste intéressante pour formaliser cette collaboration et responsabiliser les troupes. Décryptage…

Le Service Level Agreement Sales/Marketing : définition, promesses et réalité terrain

Le SLA Sales/Marketing est un accord formalisé entre les équipes commerciales et marketing qui définit les responsabilités mutuelles dans le processus de génération et de traitement des leads. Concrètement :

  • Le marketing s’engage sur un volume et une qualité de leads à fournir chaque mois ;
  • Les commerciaux s’engagent sur des délais de prise en charge et un feedback plus ou moins structuré.

L’accord type contient généralement quatre éléments :

  • La définition précise d’un Marketing Qualified Lead (MQL) avec ses critères BANT (Budget, Authority, Need, Timeline) ;
  • Le volume mensuel de MQLs à générer ;
  • Le délai maximal de prise en contact par les commerciaux (souvent 24 – 48h) ;
  • Le processus de feedback sur la qualité des leads avec les raisons de rejet.

Dans les entreprises B2B, l’adoption des SLAs s’est accélérée sous la pression de deux facteurs : l’exigence d’un ROI mesurable pousse à clarifier « qui est responsable de quoi » dans le funnel de conversion. Ensuite, les tensions récurrentes entre équipes (le marketing reproche aux commerciaux de ne pas traiter leurs leads, les commerciaux accusent le marketing de fournir des contacts non qualifiés) rendent nécessaire un cadre objectif.

En règle générale, les entreprises peu matures utilisent un simple tableau partagé avec quelques règles basiques, les organisations intermédiaires formalisent le SLA dans un document de 3 à 5 pages avec des KPIs détaillés, et les entreprises les plus matures intègrent le SLA directement dans leurs outils (CRM, marketing automation) avec des workflows automatisés et des alertes.

💡 Un gros décalage entre la théorie et la pratique
Les SLAs sont souvent créés dans l’enthousiasme d’un kick-off annuel puis ignorés dès le premier trimestre. Les commerciaux continuent de privilégier leurs propres leads, le marketing continue de mesurer son succès au volume plutôt qu’à la qualité. Le document devient rapidement un exercice quasi-administratif, complètement déconnecté de l’activité quotidienne.

Les 4 composantes d’un SLA qui fonctionne : au-delà des bonnes intentions

Pour donner toutes les chances à votre SLA Sales/Marketing de vivre et d’œuvrer pour l’alignement de vos équipes au service du business, il faudra cocher quatre cases.

#1 La définition du MQL : précision chirurgicale vs. critères flous

Il y a un débat dans la communauté B2B autour du concept de « MQL ». Certains le déclarent mort, d’autres parlent de « Buying Groups » (Forrester notamment) ou de « Conversation Qualified Leads », etc. Peu importe le terme que vous utilisez, l’enjeu reste le même : définir précisément quand un contact mérite l’attention de la force commerciale.

Un MQL défini comme « prospect intéressé par nos solutions » est voué à l’échec. Un SLA sérieux va plutôt détailler des critères objectifs et mesurables :

  • Le score comportemental minimum (par exemple : 3 contenus téléchargés) ;
  • Des données firmographiques validées (secteur, taille de l’entreprise, localisation) ;
  • Un niveau d’engagement explicite (formulaire rempli avec champs obligatoires) ;
  • Des exclusions claires (concurrents, étudiants, pays non couverts)

#2 Le feedback commercial : structuré et exploitable

Au lieu des reproches habituels que les commerciaux font aux marketeurs sur la qualité des leads, votre SLA doit imposer un feedback en trois niveaux :

  1. Statut de qualification : Qualifié / Non qualifié / À retravailler ;
  2. Raison précise : menu déroulant avec 8 – 10 options grand maximum (pas de budget, mauvais timing, concurrent installé, hors cible…) ;
  3. Action suivante : nurturing marketing, rappel dans X mois ou définitivement fermé.

Ce feedback permet au marketing d’ajuster ses critères et ses campagnes, et responsabilise les commerciaux sur les motifs de refus.

#3 Des délais d’engagement réalistes et mesurés

Promettre un contact sous 24h quand l’équipe commerciale est en sous-effectif est contre-productif. Les meilleurs SLA établissent des délais différenciés :

  • Lead « chaud » (score élevé) : contact sous 4h ouvrées ;
  • Lead « tiède » : sous 48h ;
  • Lead « froid » : sous 5 jours.

Ces délais sont automatiquement trackés dans le CRM avec alertes et escalade managériale pour responsabiliser chacun sur sa partie.

#4 Le système de révision : intégré dès le départ

Un SLA figé est un SLA mort-né. Il faut impérativement prévoir une revue périodique (mensuelle par exemple) des taux de conversion par source, un ajustement des critères MQL (le plus souvent par trimestre) et une clause de révision exceptionnelle si le taux de rejet dépasse 40 % à un moment donné.

La gestion des cas limites : quand le lead ne rentre dans aucune case

Même le SLA le plus détaillé se retrouvera face à des leads qui défient toute catégorisation. Ces cas limites, qui peuvent représenter jusqu’à 20 % du volume dans le B2B, deviennent une source majeure de friction s’ils ne sont pas anticipés.

Prenons quelques exemples concrets :

  • Un directeur général d’une ETI télécharge un livre blanc de bas de funnel, mais son entreprise est sous le seuil de taille défini dans vos critères MQL ;
  • Un prospect remplit tous les critères, mais il est basé dans un pays où vous n’avez qu’un partenaire (pas de présence directe) ;
  • Ou encore : un lead « parfait » sur le papier… mais qui travaille chez un de vos clients, dans une division différente. Les commerciaux peuvent dire « c’est un client, pas un nouveau lead, je ne le traite pas », et le marketing peut dire « c’est une autre division, avec une certaine autonomie, donc c’est un nouveau lead légitime ».

La tentation est de créer des règles pour chaque exception… Erreur fatale : vous allez vous retrouver avec un SLA de 50 pages que personne ne lira. Définissez plutôt un processus d’escalade, où les cas limites remontent à un binôme décisionnaire (un senior marketing + un senior commercial) qui tranche sous 24h selon une règle très simple : le business potentiel prime sur les règles.

Ce binôme documente chaque décision dans un fichier partagé avec trois informations : le cas, la décision prise et le cheminement logique. Au bout de « x » cas similaires, une nouvelle règle est créée.