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L’insatisfaction post-achat dans le B2B : la gestion des attentes et la frontière entre la persuasion et l’exagération

Un client qui se sent floué juste après l’achat n’a pas forcément été trompé par le commercial. S’il a l’impression de ne pas en avoir pour son argent, c’est probablement qu’un décalage s’est progressivement créé entre ses attentes et la réalité. Et ce décalage ne vient pas toujours d’un mensonge : il peut être le résultat de l’enthousiasme (exagéré) du commercial, de l’omission d’une limite du produit, ou d’une interprétation un peu trop optimiste du côté de l’acheteur.

À ce stade, inutile de chercher à prouver qui a raison. Ce qui compte, c’est de désamorcer la frustration et de reprendre le contrôle de la relation client qui se trouve dans une phase doublement fragile (insatisfaction + phase naissante de la collaboration).

Survendre, même sans « mentir », est un (gros) problème

Survendre, ce n’est pas seulement promettre l’impossible ou embellir une offre au-delà du raisonnable. C’est faire en sorte que le prospect ou client (dans le cas d’un upselling) imagine un niveau de valeur ou de performance supérieur à la réalité. Contrairement à ce que l’on pourrait penser, il n’est pas nécessaire d’inventer des bénéfices ou de mentir ouvertement pour flouer l’interlocuteur.

Le commercial peut très bien survendre par l’omission. Par exemple, il choisira de ne pas évoquer une contrainte d’implémentation, de passer sous silence un risque exogène ou de laisser croire qu’une fonctionnalité est performante alors qu’elle est toujours en phase d’amélioration chez l’équipe produit.

De son point de vue, il ne trompe pas son interlocuteur : il se contente de promouvoir son produit en mettant en avant ses points forts et en évitant les éléments qui pourraient provoquer des objections ou ralentir la vente.

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Le problème, c’est que cette survente par omission finira par se retourner contre l’entreprise, et par construction, contre le commercial. Un client qui découvre tardivement une limite qu’on ne lui a pas expliquée ne va pas simplement être déçu : il aura l’impression d’avoir été piégé. Et plus l’investissement est stratégique (par son montant, le nombre d’utilisateurs du produit, l’urgence, etc.) plus le sentiment de frustration sera fort. Résultat : demandes de compensation, négociations post-signature, perte de confiance, bouche-à-oreille négatif, voire résiliations et litiges.

Un commercial performant ne doit pas uniquement convaincre : il doit créer une perception juste de la valeur et éviter tout discours déceptif. Ne pas tout dire peut aider à closer un deal plus vite, mais si le client découvre les angles morts après l’achat, c’est le début d’un cycle qui peut coûter bien plus que le revenu généré.

L’intégrité commerciale comme levier de conversion : ce que dit la science

Si la survente par omission expose le commercial et son entreprise à des frustrations post-achat, une expérimentation scientifique a démontré qu’une approche plus transparente est non seulement plus éthique, mais aussi plus efficace.

L’expérimentation à trois variables

Une étude menée par The Marketing Practice (TMP) et B2B DecisionLabs auprès de 500 décideurs B2B a testé plusieurs types de discours commerciaux afin d’identifier celui qui générait le plus d’engagement et qui aboutissait à une décision favorable pour le commercial.

L’objectif de cette expérimentation était simple : comprendre comment un acheteur perçoit le message commercial et quels types d’arguments déclenchent réellement un passage à l’action. Les chercheurs ont testé cinq variantes en jouant sur trois paramètres :

  1. L’impact chiffré ou non de la problématique (un problème présenté avec ou sans données concrètes sur ses conséquences) ;
  2. Le ton employé dans le discours commercial (plutôt émotionnel ou strictement rationnel et factuel, avec ou sans storytelling) ; 
  3. Le degré de nuance dans la présentation de la solution (un discours qui se concentre uniquement sur les bénéfices vs. un discours qui évoque aussi les risques et les limites du produit).

Les chiffres, le storytelling et, surtout, l’intégrité

Le discours qui a le mieux performé adopte une approche émotionnelle pour capter l’attention et rendre le problème tangible, des données chiffrées qui renforcent la crédibilité des arguments et, surtout, une certaine honnêteté et intégrité en évoquant les risques et les limites du produit.

L’expérimentation montre qu’un commercial qui ne cherche pas à masquer les limites de son offre (avec un certain talent) renforce sa crédibilité et incite l’acheteur à s’engager plus rapidement. En effet, un prospect qui perçoit qu’on lui présente une vision réaliste aura tendance à accorder davantage de confiance à son interlocuteur, et donc à considérer son offre comme une option viable.

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Cela ne signifie pas que le commercial doit insister sur les difficultés ou se montrer excessivement prudent. L’expérimentation montre que tout est question d’équilibre : trop d’optimisme nuit à la crédibilité, mais trop de prudence peut ralentir la vente. L’approche la plus efficace consiste donc à soutenir ses arguments par des faits tangibles et un bon storytelling sans omettre les limites et les risques. On fait la promotion du produit sans perdre de vue le risque de dissonance post-achat.

Que faire quand le client se sent floué après l’achat ?

Même en étant transparent lors de la vente, il peut arriver que le client ressente une forme de déception après coup. Un détail mal compris, une attente mal cadrée ou une difficulté d’implémentation peuvent suffire à créer une frustration.

Et dans le B2B, l’insatisfaction se propage rapidement aux autres parties prenantes. Dans cette situation, le pire réflexe serait de nier le problème ou de rejeter la faute sur le client. Peu importe que son mécontentement soit justifié ou non, c’est sa perception qui compte. Plutôt que de chercher à se défendre, mieux vaut désamorcer la tension et reprendre la main sur la relation.

1. Identifier précisément l’origine du problème

Avant de répondre, il faut comprendre ce qui a réellement déclenché la frustration :

  • Est-ce un problème d’exécution ? Retard de livraison, implémentation plus complexe que prévu, support insuffisant… ;
  • Une attente non satisfaite : le client pensait pouvoir utiliser le produit d’une certaine manière, mais découvre que ce n’est pas le cas ;
  • Un effet de comparaison : après l’achat, il se rend compte qu’une alternative concurrente semble proposer un meilleur rapport qualité-prix.

Dans bien des cas, ce qui gêne le client, ce n’est pas tant le problème lui-même que le fait de ne pas l’avoir anticipé. Il a l’impression d’avoir découvert un point faible qu’on lui a caché, ce qui crée un sentiment de méfiance.

2. Reconnaître la frustration sans tomber dans l’excès

Il faut montrer au client mécontent que l’on prend en compte son ressenti, sans pour autant aller trop loin dans les excuses (sauf si vous êtes clairement en tort). Une réaction trop défensive ou trop conciliante peut renforcer son impression d’avoir été dupé.

Ce qu’il faut dire :

  • « Je comprends votre point de vue, voyons ensemble comment ajuster au mieux la situation » ;
  • « Effectivement, ce point n’a pas été abordé en détail, mais voici comment nous pouvons y remédier ».

Ce qu’il faut éviter :

  • « Vous auriez dû mieux lire la documentation ».
  • « Ce n’était pas précisé dans le contrat, donc nous ne pouvons rien faire ».

L’objectif est de désamorcer la tension sans pour autant valider un reproche injustifié.

3. Agir sans s’écraser, sans envenimer la situation

Un client insatisfait n’est pas forcément un client perdu. Tout dépend de la manière dont la situation est gérée. Certains clients mécontents peuvent même devenir fidèles lorsqu’ils sentent qu’un effort sincère est fait pour trouver une solution.

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C’est peut-être cliché de le dire, mais vous pouvez très bien transformer cette frustration en une occasion pour approfondir la relation et montrer la qualité de votre service :

  • Corrigez immédiatement ce qui peut l’être. Si l’insatisfaction repose sur un point ajustable (une configuration mal calibrée, une prestation qui peut être étendue sans dégrader la rentabilité, un support insuffisant), il faut régler le problème sans tergiverser. Ne laissez surtout pas traîner l’insatisfaction si la correction est évidente. C’est la pire erreur à faire, surtout en début de collaboration. Votre nouveau client aura l’impression que l’entreprise ne le prend pas au sérieux… et il n’aura pas forcément tort.
  • Il arrive qu’un client se persuade d’une promesse qui n’a jamais été faite par le commercial. Dans ce cas, inutile de vous excuser pour quelque chose qui relève de son interprétation. Mieux vaut recadrer la discussion en expliquant factuellement ce qui a été vendu, sans arrogance, mais avec un peu de fermeté. Par exemple : « Le contrat prévoit un déploiement en X semaines, ce qui a été respecté. Ce que vous attendez relève d’un développement supplémentaire, qui peut être envisagé dans un second temps ».
  • Faites évoluer la discussion vers une issue réaliste. Si le client demande quelque chose qui sort du cadre initial, vous avez trois options : lui expliquer pourquoi ce n’est pas faisable et l’orienter vers une alternative plus adaptée, lui proposer une évolution du service sous certaines conditions (coût supplémentaire, modification du cadre contractuel) ou, s’il est dans une position stratégique pour vous (gros client, forte visibilité), faire un pas vers lui pour préserver la relation.

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