On dit souvent que le contenu est roi. En réalité, depuis la pandémie et l’accélération de la transformation digitale qui en a résulté, le contenu est devenu EMPEREUR. Dans le B2B, les audiences n’ont jamais montré autant d’appétence pour des contenus de qualité, essentiellement pour évoluer en autonomie dans leur parcours d’achat et prendre une décision éclairée. Cette étude Accenture synthétisée par BtoB Leaders explore cette thématique qui a marqué les deux dernières années dans le B2B.
Côté marketing, cette demande massive impose une industrialisation de l’effort de création de contenu… mais toutes les entreprises n’ont pas les moyens de s’offrir une équipe éditoriale de haut niveau ou de confier cette partie décisive à des experts externes.
Comme souvent, les pépites de la MarTech se sont activées pour se saisir de ce besoin qui coche toutes les bonnes cases : il est universel (concerne à la fois le B2B et le B2C), urgent, durable et à fort potentiel commercial. Nous avons donc logiquement assisté à l’émergence de solutions de création de contenu assistée par l’Intelligence Artificielle et le Machine Learning. En somme, il s’agit pour l’utilisateur de piloter un outil qui l’accompagne qualitativement (suggestion d’idées) et quantitativement (rédaction à partir d’un brief).
Jasper (ex Jarvis) est sans doute le logiciel qui bénéficie de la plus grande notoriété dans cette niche, à la faveur d’une campagne marketing offensive, voire agressive, mais aussi de quelques fonctionnalités inédites. L’équipe éditoriale de BtoB Leaders l’a testé pendant quelques semaines et vous livre son ressenti. Spoiler : c’est… mitigé.
Sommaire
Qu’est-ce que Jasper AI ?
Jasper AI est un logiciel d’Intelligence Artificielle qui exploite la technologie « GPT-3 » pour créer des textes et des accroches pour les réseaux sociaux, les campagnes emailing, les annonces publicitaires, les articles de blog, les vidéos YouTube, etc.
L’utilisateur fait son choix parmi les formats proposés, règle divers paramètres comme la taille du texte attendu, le ton (formel, informel…), la langue ou encore la qualité, et rédige un brief plus ou moins détaillé qui servira de guide à l’outil.
Les textes sont créés progressivement, par incrément : l’outil propose un premier paragraphe, et attend que l’utilisateur « valide » ce qui a été créé pour aller plus loin, jusqu’à obtenir le texte souhaité.
Pour notre test, nous avons souscrit au « Boss Mode », une formule qui permet d’exploiter le plein potentiel de l’outil à hauteur de 50 000 mots par mois. La prise en main est relativement aisée. Certes, il faut acquérir un petit tour de main pour maîtriser les différents modes proposés, mais l’interface est ludique, et on sent que l’expérience utilisateur a été travaillée dans les règles de l’art.
Malgré le fait que l’outil embarque un module d’IA relativement puissant, nous n’avons pas ressenti de lenteurs particulières ou de lags, même sur des ordinateurs « ordinaires ». Jusque-là, tout va bien. Quid des résultats ?
Comment configurer Jasper pour rédiger un article de blog ?
Pour notre test, nous avons choisi de rédiger un article de blog en passant par la fonctionnalité « Blog Post Workflow ». Jasper nous demande alors de le briefer en plusieurs étapes :
- Décrire en quelques phrases le contenu que nous souhaitons créer ;
- Intégrer jusqu’à trois mots-clés qui figureront dans le texte ;
- Saisir un titre manuellement, ou laisser Jasper le soin de nous faire des propositions ;
- Laisser Jasper générer quelques propositions pour le paragraphe d’introduction de notre article de blog. Le paragraphe retenu sera utilisé en input pour créer la suite de l’article ;
- Saisir un plan manuellement, ou laisser Jasper nous faire des propositions ;
- Ici, nous recommandons de laisser Jasper rédiger la conclusion de l’article avant de passer au corps du texte. Pourquoi ? C’est simple. Jasper peut lire le titre de l’article ainsi que les différents sous-titres (à partir du plan généré) pour rédiger une conclusion pertinente. Si vous rédigez le corps de l’article avant de demander à Jasper de rédiger une conclusion, il vous proposera une conclusion en se basant uniquement sur le tout dernier paragraphe… Ce sera donc la conclusion de la dernière partie, pas la conclusion de l’article ;
- Jasper dispose d’un titre, de plusieurs sous-titres et d’une conclusion. Il peut donc rédiger le reste du texte avec suffisamment de contexte.
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Notre avis sur le forme et le fond
Avant toute chose, nous avons souhaité vérifier un point crucial : les contenus créés par Jasper sont-ils originaux au sens SEO du terme ? Si l’on en croit nos tests sur Copyscape, oui. Jasper produit des textes sans plagiat, en français comme en anglais. Vous n’avez donc aucun souci à vous faire de ce côté-là. Venons-en à présent à l’essentiel : quelle est la qualité de l’output ? Voici nos retours sur la forme, puis sur le fond.
Sur la forme, Jasper ne fait pas de fautes… mais il ne fait pas rêver
Le texte produit par Jasper ne contient aucune faute d’orthographe, de vocabulaire ou de grammaire. Les paragraphes sont aérés, les phrases sont relativement courtes. Voilà. Le positif s’arrête là.
Jasper rédige dans un français que l’on qualifiera de simple, mais pas dans le bon sens du terme. Les phrases sont très « anglophones », avec quasiment pas de compléments circonstanciels. C’est un peu l’équivalent du « simple English », une forme d’anglais développée par le linguiste Charles Kay Ogden qui ne contient que 850 mots. On retrouvait déjà cette problématique dans les logiciels de spinning.
On aboutit à un texte dans un ton très encyclopédique, très robotique, donnant une impression d’austérité. Ça peut passer pour une fiche produit, un texte à vocation SEO ou un dictionnaire en ligne, mais Jasper ne pourra jamais créer un article d’opinion comme un édito, une chronique, un billet d’humeur, etc.
Sur le fond, Jasper alterne entre l’acceptable et le catastrophique
Si l’on reste sur des sujets très grand public, comme « Le top 5 des meilleurs smartphones en 2022 » ou « L’importance d’une activité physique régulière pour la santé », Jasper ne s’en sort pas trop mal, sans toutefois s’aligner sur les standards des blogs sérieux. En effet, l’outil ne produit rien de foncièrement scandaleux, mais il a tendance à enchaîner les lieux communs, les vérités générales et les phrases bateau.
Vous pouvez en revanche oublier Jasper dès que le sujet devient un peu plus pointu. Le résultat sera très mitigé, et vous passerez sans doute plus de temps à reformuler, compléter et faire du fact-checking. Oui, du fact-checking, car Jasper invente parfois des études et des statistiques de toute pièce. L’éditeur doit sérieusement envisager un module pour sourcer les chiffres avancés.
Nous vous expliquions que Jasper rédigeait par incrément. Il propose un paragraphe que l’utilisateur doit valider, avant de cliquer sur un bouton pour demander à Jasper de poursuivre la rédaction. A notre grand étonnement, Jasper bloque parfois sur une idée et se contente de reformuler la dernière phrase encore, encore et encore. C’est très frustrant. Dans le même registre, Jasper a tendance à revenir sur une idée développée dans un paragraphe en début de texte pour en reparler au milieu ou à la fin de l’article. Cette limitation vient du fait que l’outil ne lit que les 2 000 à 3 000 caractères qui précèdent la phrase à rédiger.
Verdict…
Le manque de créativité, le langage robotique et la pauvreté des textes rendent Jasper inutilisable dans un contexte marketing sérieux, à fortiori dans le B2B où les sujets sont pointus et les attentes des lecteurs (très) élevées. Jasper peut, tout au plus, servir comme un générateur d’idées, pour proposer par exemple un plan à partir d’un titre… mais est-ce bien raisonnable à 59 $ par mois ?
Clairement, et quoi qu’en dise l’éditeur, Jasper a été pensé pour rédiger des textes à vocation SEO, que ce soit pour alimenter des réseaux de site de type PBN ou faire du netlinking. Et même sur ce point, la nouvelle mise à jour « Helpful Content » de Google pénalise les contenus rédigés pour l’algorithme plutôt que le lecteur…
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