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Le digital n’est ni une fin en soi, ni une menace pour les équipes commerciales : il leur permet d’être plus performants dans l’acquisition

Dekuple B2B, acteur majeur du conseil en marketing digital B2B, et BtoB Leaders, média de référence du B2B, vous proposent une série d’interviews en immersion avec des professionnels qui ont piloté la transformation digitale de leur structure. Pour ce quatrième épisode, nous avons eu le plaisir d’échanger avec Anne Poueymidanette, Directrice marketing digital, Europe du Sud-Ouest (SWE) pour la branche d’activité Industriel Marchand (IM) chez Air Liquide. C’est parti !

Commençons par la genèse de la transformation. D’où vient cette décision de transformer ?

La décision de transformer notre activité de prospection en développant son volet digital trouve son origine dans la mise en place d’un outil de transaction. Cet outil de gestion des commandes en Europe avait pour objectif d’améliorer la satisfaction client, de s’adapter à leurs usages et d’optimiser les process administratifs. Cette solution embarquait un module de catalogue/e-commerce. 

Dans une logique d’amélioration continue, à la fois pour servir l’expérience client et la performance du business, les équipes marketing ont choisi de tester ce module. C’est dans ce contexte que nous avons véritablement lancé la réflexion de notre transformation digitale sur la partie marketing et vente pour aboutir à une activité de LeadGen.

Je distingue trois principales étapes dans cette transformation :

  1. Nous avons commencé par des pilotes sur des sujets business « classiques », en utilisant essentiellement des landing pages externes et du payant sur LinkedIn et Google Ads. Cela a permis de démontrer qu’il était possible avec le digital de générer des leads conformes aux cibles recherchées.
  2. La refonte des sites web en Europe, qui nous a conduits à définir une feuille de route SEO et UX pour transformer notre site web en un canal digital clé pour fournir des leads aux équipes de vente. L’équipe marketing digital s’est également structurée autour de pôles contenu ou plus techniques.
  3. Enfin, l’étape actuelle consiste à revisiter au sens large l’activité de prospection, dont l’activité de marketing digital est l’une des briques. Au cours de cette étape, les rôles de chacune des équipes ont été reprécisés : le marketing a pour mission, entre autres, de fournir des leads qualifiés aux équipes de vente, les équipes commerciales ont pour rôle de convertir ces leads en contrats et le marketing digital vient en support aux équipes marketing et commerciales pour atteindre cet objectif.

Nous avons donc consolidé cette décision de poursuivre cette transformation sur le temps long, à la fois grâce aux résultats encourageants, délivrés année après année et suivis précisément (opérationnels et management ayant besoin de ce suivi rigoureux), mais aussi grâce aux retours d’expérience LeadGen inspirant d’autres acteurs du B2B.

Quels ont été les grands chantiers structurants de la transformation d’Air Liquide IM Europe du Sud-Ouest?

Au niveau des équipes marketing et marketing digital, je citerais deux grands chantiers:

  • Travailler les personas. C’est un sujet capital, car de ces personas découle la stratégie d’acquisition et de production de contenu, puisque cela nous permet par exemple d’identifier les sujets qui intéressent nos prospects et sur lesquels nous allons communiquer. Pour construire ces personas, des grilles d’entretiens rigoureuses ont été coconstruites. Nous avons choisi de conduire ce projet en interne car au sein du Groupe, nous pensons qu’expérimenter est un facteur de succès et cela fait partie de notre culture d’entreprise.
  • Analyser les résultats business des actions digitales en répondant par exemple aux questions suivantes : les leads générés sont-ils alignés avec la cible prospect souhaitée ? Le retour sur investissement des actions digitales est-il au rendez-vous ?

Je note également deux grands sujets côté vente :

  • La définition de l’organisation à adopter pour qualifier les leads. Faut-il confier la tâche à un commercial ou créer une équipe dédiée pour la qualification ? Sur ce point, nous avons choisi, après plusieurs tests, de confier cette activité à des commerciaux sédentaires.
  • La définition d’un process de référence de gestion des leads.  Chez Air Liquide, quand ils existaient, ces process de gestion des leads pouvaient être très différents selon les pays et les segments de clients. Travailler sur la convergence et l’harmonisation des process pour, entre autres, tracer la performance des actions d’acquisition de leads, est indispensable.

Enfin accompagner ces chantiers d’une communication constructive a été et est encore important pour encourager les équipes opérationnelles (ventes, marketing, marketing digital et communication) à avancer ensemble dans une seule et même direction : développer efficacement le business et, quand cela fait sens, en s’appuyant sur le digital. Le digital n’est ni une fin en soi, ni une menace pour les équipes commerciales, mais un outil d’efficacité qui doit leur permettre d’être plus performants dans l’acquisition de nouveaux business.

Vous avez parlé d’organisation adaptée pour la qualification des leads. Quelle est la configuration que vous avez adoptée sur ce volet ?

Plusieurs essais ont été réalisés. Premièrement, nous sommes arrivés à la conclusion qu’il fallait que la qualification de leads soit réalisée par une équipe sédentaire.

Une option intéressante a consisté à mettre en place une cellule de qualification en interne, avec des collaborateurs issus de la télévente, qui ont donc un background sur les appels sortants.

A noter : quelle que soit l’option actuellement mise en place par pays ou sous-segment de clients, la personne qui qualifie les leads va en général se charger de convertir la piste en opportunité. Cela nous permet d’aboutir à un process de gestion des leads « sans rupture » et donc de mesurer plus facilement l’efficacité de nos actions.

Enfin, comme nous sommes sur des solutions complexes et techniques, s’est rapidement posée la question des profils des personnes qui qualifient les leads. Ils doivent avoir un minimum de connaissances techniques pour savoir si une piste est bien une opportunité ou non. La question du bagage technique nécessaire est régulièrement challengée en interne dans une dynamique d’amélioration continue.

Quid des résultats ? Cette configuration a-t-elle donné satisfaction ?

La configuration « cellule de qualification en interne » avec des collaborateurs sédentaires dans les équipes commerciales donne satisfaction. Mettre en œuvre une activité de qualification de leads structurée a nécessité de former ces collaborateurs :

  • aux solutions proposées par Air Liquide IM en Europe du Sud-Ouest;
  • à la détection d’un besoin client ;
  • au process d’enregistrement des pistes en opportunités.

Et cela nécessite aussi que ces collaborateurs, qui ne sont pas dédiés à 100 % à la qualification de leads, soient managés sur cette nouvelle dimension de leur activité. Quand toutes ces conditions sont réunies, nous multiplions le nombre d’opportunités détectées par trois.

Pouvez-vous situer la transformation marketing digital d’Air Liquide IM en Europe du Sud-Ouest dans le temps ?

De mon point de vue, il faut, au minimum, cinq années pour faire les choses dans les règles de l’art. Une machine de génération de leads bien huilée, qui génère des résultats intéressants et (surtout) mesurables avec une bonne fiabilité, nécessite un travail de 6 à 7 ans pour une structure présente dans plusieurs pays et avec plusieurs sous-segments de clients.

Si vous ne deviez retenir que trois points de vigilance sur ce projet de transformation ?

  1. Travailler les relations, en interne, en mettant en place une collaboration de qualité, entre autres avec l’IT pour ne pas s’enfermer dans une relation de client à fournisseur, mais travailler véritablement ensemble. Développer des relations de qualité avec les partenaires extérieurs pour intégrer de nouvelles expertises, est aussi indispensable.
  2. Mettre en place un pilotage chiffré, autrement dit documenter et mesurer dès le départ les actions entreprises pour démontrer leur valeur et prioriser les actions futures.
  3. Rappeler que faire du marketing digital, c’est avant tout faire de la transformation. Cette posture change tout, notamment dans le management des équipes.

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